On l’a vu sur nos pages, la langue allemande s’est imprégnée du français. Mais même en linguistique, les apparences peuvent être trompeuses.
C’est sans doute arrivé à beaucoup d’expatrié*es en Allemagne. Un petit mot glissé dans une phrase et prononcé si parfaitement que l’on pourrait croire la personne bilingue, qui nous adresse un petit clin d’œil comme pour dire : il vient de chez toi, ce mot ! Mais attention, tout ce qui semble français ne l’est pas forcément – et surtout pas les mots. Voici notre TOP des faux gallicismes de la langue allemande.
5. Raffinesse
Voici une évolution linguistique intéressante. Le mot finesse s’étant déjà confortablement installé dans la langue allemande, il a paru tout naturel de s’en inspirer pour former un autre substantif, Raffinesse. Las, le français lui préfère le raffinement. Qu’à cela ne tienne, Raffinesse est resté, utilisé tant au sens mélioratif de subtilité, que plus péjorativement pour finasserie.
4. Friseur
Comme notre numéro 4, ce mot puise directement son origine du français, en l’occurrence du mot friser, boucler. L’allemand en a fait son coiffeur, tandis que la forme féminine est passée du pseudo-gallicisme Friseuse au néo-germanisme Friseurin au fil du temps. On trouve même une forme encore davantage germanisée et « umlautée » de ce mot : Frisör / Frisörin. Si cet idiome semble bien être un faux gallicisme, certaines sources en évoquent néanmoins un usage rare et ancien dans la France du 16e siècle.
3. Gardine
Non, la Gardine ne se trouve pas sur l’étalage de votre poissonnerie et n’est pas le fruit d’improbables amours entre un gardon et une sardine. C’est le mot allemand pour rideau ! Il vient du bas-allemand et du hollandais, s’est propagé à partir des 15e et 16e siècles et désignait à l’origine uniquement les rideaux de lit. On pense parfois à tort que c’est un mot français, car pouvant sonner comme tel aux oreilles allemandes. Les rideaux ou autres volets et leur usage sont d’ailleurs un sujet majeur d’incompréhension interculturelle de part et d’autre du Rhin. Qui n’a pas cherché en vain le sommeil à la lumière de la lune ou du réverbère pendant de longues nuits en échange scolaire, perplexe devant l’absence de rideaux à la fenêtre ?
2. Delikatessen
Prenez un mot français, la délicatesse. Ajoutez-lui un k et une terminaison plurielle (-en) bien allemands. Changez le sens du mot original. Vous obtenez ainsi Delikatessen, qui signifie en allemand un met délicieux, sans être forcément raffiné à l’origine. Ce faisant, vous vous rapprochez ainsi involontairement d’un mot français tombé en désuétude, les délicatesses, désignant lui aussi une gourmandise. Faites traverser l’Atlantique au mot allemand, dans les bagages des commerçants juifs qui nommèrent ainsi leurs épiceries de luxe. Vous obtenez le mot américain delicatessens puis delicacy, abrégé en deli. Ce paragraphe m’a donné faim et la bougeotte, à vous aussi ?
1. Blamage
Avant de nous mettre aux fourneaux ou de faire nos bagages, concluons notre TOP 5 avec ce mot tout droit tiré du verbe blâmer pour désigner à compter du 18e ou 19e siècle une situation embarrassante, un moment de honte et la gêne publique qui s’en suit. Tout comme l’adjectif associé blamabel, qui signifie donc embarrassant, gênant, et contrairement à ce que peuvent croire nombre de ceux*celles qui l’emploient, ce mot n’est pas d’origine française, mais une construction d’invention allemande. Il est pourtant volontiers employé avec une prononciation ostensiblement française et dans des contextes propices aux clichés. Par exemple, Die Blamage der Grande Nation est un titre tapageur que vous trouverez à coup sûr dans les journaux, au lendemain de la débâcle de la France lors d’un quelconque événement sportif.
Et si pour rire un peu, on importait ces « faux mots » en français ? Pas sûr que cela soit du goût des poussiéreux Immortels de l’Académie Française…
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